L’Ostéopathie et la Médecine : Vers une Réévaluation Scientifique et Juridique
L’ostéopathie, bien qu’encore parfois perçue comme une pratique alternative, a parcouru un long chemin vers la reconnaissance en France. Au-delà des simples techniques manuelles, elle s’inscrit dans une approche globale de la santé, avec une médicalité qui mérite d’être reconnue à sa juste valeur. C’est ce que défendait brillamment Pierre-Luc L’Hermite, ostéopathe D.O. et docteur en droit, lors de sa conférence du 12 janvier 2019.
La médicalité de l’ostéopathie : un lien consubstantiel avec la médecine
Pierre-Luc L’Hermite soulève une question fondamentale : comment penser la médicalité de l’ostéopathie sans l’associer à celle de la médecine traditionnelle ? En effet, bien que l’ostéopathie ait longtemps été perçue comme une pratique à la marge, elle repose sur des principes communs à la médecine moderne. Les deux disciplines partagent des bases cliniques solides, même si leur approche du corps et de la santé diffère parfois.
Il est essentiel de rappeler que l’ostéopathie est une profession de première intention, reconnue par le Ministère de la Santé. À ce titre, l’ostéopathe a la responsabilité d’évaluer la condition de ses patients et de les orienter, si nécessaire, vers des soins médicaux supplémentaires. L’ostéopathie, loin d’être une simple technique alternative, participe activement à la santé publique en se concentrant sur les troubles fonctionnels, là où la médecine conventionnelle se concentre principalement sur les pathologies structurelles.
Un parcours historique marqué par des luttes réglementaires
Depuis sa création par Andrew Taylor Still en 1874, l’ostéopathie a souvent été en marge du cadre médical officiel. En France, son parcours vers la reconnaissance a été semé d’embûches. Comme l’explique Pierre-Luc L’Hermite, les décrets de 2007 et 2014 ont joué un rôle déterminant dans l’harmonisation de la formation des ostéopathes et dans la définition des actes autorisés.
Les détracteurs de l’ostéopathie affirment parfois que cette discipline manque de fondement scientifique, mais L’Hermite rétorque que la médicalité de l’ostéopathie repose sur une démarche rigoureuse, bien que différente de celle de la médecine classique. Cette différence épistémologique entre les deux disciplines ne devrait pas être vue comme un conflit, mais plutôt comme une complémentarité.
Une médicalité de gradation : vers une nouvelle conceptualisation des soins
Pierre-Luc L’Hermite propose de repenser la médicalité non pas de manière binaire (soit une pratique est médicale, soit elle ne l’est pas), mais de façon graduelle. Selon lui, il existe des degrés de médicalité, et l’ostéopathie se situe sur ce spectre en tant que pratique intégrée aux soins de santé.
L’ostéopathie se distingue en particulier par son intérêt pour les troubles fonctionnels, souvent négligés par la médecine allopathique. Ce qui échappe parfois à la médecine conventionnelle est précisément le champ d’action privilégié de l’ostéopathie. Par conséquent, les deux approches, loin d’être antagonistes, doivent travailler main dans la main pour offrir une prise en charge globale des patients.
Une reconnaissance juridique en devenir
Sur le plan juridique, L’Hermite rappelle que l’ostéopathie est souvent confrontée à des défis liés à sa définition. En tant que praticiens non-médecins, les ostéopathes se trouvent parfois en conflit avec les médecins pour la reconnaissance de leurs compétences. Toutefois, les réformes récentes tendent à ouvrir des voies de collaboration et de régulation plus claires, permettant de mieux définir les champs d’intervention de chacun.
Un point clé abordé dans la conférence est le diagnostic d’opportunité, qui permet à l’ostéopathe de reconnaître les symptômes nécessitant une prise en charge médicale et d’orienter ses patients en conséquence. Cet acte est une preuve supplémentaire de la responsabilité clinique des ostéopathes et de leur rôle central dans le système de santé.
Conclusion : l’ostéopathie, un acteur clé du système de santé
En conclusion, Pierre-Luc L’Hermite nous invite à repenser la place de l’ostéopathie dans le système de santé moderne. Il plaide pour une reconnaissance accrue de la médicalité graduelle de l’ostéopathie, tout en soulignant l’importance de collaborer avec la médecine traditionnelle. Le futur de la santé repose sur une approche pluridisciplinaire, où chaque acteur, du médecin à l’ostéopathe, peut jouer un rôle essentiel dans le bien-être des patients.
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